#ENTRETIENDULUNDI - GUILLAUME GILLE après l'EURO 2022
En conclusion de l’EHF EURO 2022 qui a vu les Bleus terminer au pied du podium, le sélectionneur de l’équipe de France revient sur le déroulé d’une compétition atypique. Qualifiée pour le Mondial IHF 2023 (Pologne et Suède), la France est exempte des qualifications. Guillaume Gille se projette donc sur les prochains rendez-vous au mois de mars et d’avril où son équipe disputera des matches amicaux.
Quel sentiment t’anime à la sortie d’une « petite finale » perdue à l’issue de la prolongation ?
C’est une déception de ne pas arriver à concrétiser et à valider ce match qui a été un grand match de handball. On peut être très fier de ce qu’on a réalisé, même s’il y a beaucoup de frustration de ne pas avoir eu cette maitrise dans les derniers instants. On aurait pu mieux négocier certains ballons. Je le répète, on peut être très déçus, mais aussi fiers, car cela a été la compétition la plus compliquée que j’ai pu connaitre, en tant que coach ou en tant que joueur.
Après le scénario cruel de la demi-finale face à la Suède, quelle a été la méthode, en moins de 48h, pour relancer la troupe tricolore ?
Il faut du temps pour accepter la déception de ne pas être en finale. C’est une forme de deuil un peu personnel où chacun va à une vitesse différente. C’est important d’en parler, d’être un peu moins focalisé sur le handball. On l’a vu, le match des places 3-4, ne se joue pas seulement sur qualités tactiques ou techniques, surtout très mentales.
La performance exceptionnelle de Kentin Mahé hier rajoute-elle des regrets quant à son absence sur les matchs précédents ?
On ne vit pas avec des si et des potentiels. Quand on parle d’adaptation, on doit faire avec ceux qui sont présents et qui sont valides, ceux qui ont en mesure de tenir leur place sur le terrain. Kentin, on ne mesure pas ce qu’il a réalisé à la sortie de sept jours d’isolement, à pédaler sur son vélo et à la limite de péter les plombs. Franchement, c’est horrible ce que l’on demande aux gens dans ce cadre. Tout cela démontre son caractère, son énergie et sa capacité d’impact dans le jeu. Je suis ravi qu’il ait pu faire ce grand match.
Comment évalues-tu cette 4e place ?
Comptablement, lorsque tu entres dans la bagarre de ce dernier carré, tu espères autre chose, car notre ambition était d’être tout en haut. Force est de constater que nous avons raté quelques marches. Le temps du débriefing viendra pour être en mesure de continuer à développer notre jeu et à améliorer nos complémentarités.
Et jusqu’au bout de la compétition, l’EHF aura marqué de son empreinte cet Euro avec une remise de médaille pour le moins inédite à destination des joueurs et des membres du staff. Surprenant non ?
La médaille pour la quatrième place, c’est un peu la cerise sur le gâteau de cet Euro, où j’ai l’impression qu’on nous aura tout fait subir en quinze jours. Encore une fois, je ne remettrai pas en cause l’idée plutôt sympathique de laisser un souvenir à l’équipe qui participe à ce week-end final, mais culturellement cela n’appartient pas à notre sport. Il existe d’autres activités où la 4e place est primée, mais cela ne fait pas partie de la culture du handball. Alors recevoir cette médaille, c’est un peu la double peine au moment où tu regardes le tableau d’affichage qui ne t’est pas favorable.
Pendant plus d’un mois, tu as été confronté à de nombreux bouleversements. En quoi cela a perturbé le travail avec ton équipe ?
Les conditions logistiques, les problématiques des blessures, les absents, la Covid-19, on a eu tous les jours de nouveaux cas à gérer. C’était le crash test que l’on a subi sur beaucoup de secteurs. Je trouve que c’est à mettre au crédit de cette équipe-là. Son envie de performer dans ce contexte et le bordel ambiant, c’est juste top.
Est-ce possible de retirer du positif avec autant d’épisodes qui ont parfois fait penser à une mauvaise série TV ?
Je trouve que nous avons fait preuve d’adaptation. On a eu des galères tous les jours, mais on a réussi à rester focus sur le handball. Tout ceci nous a demandé énormément d’énergie et d’adaptation en tant que staff. C’est certain, que nous avons vécu des choses uniques qui, je l’espère, le resteront.
Comment ton groupe a t-il traversé cette période assez invraisemblable ?
Malgré tout, je loue l’état d’esprit de ce groupe rajeuni qui a encore beaucoup de choses à apprendre, un groupe qui est sur la bonne voie, avec lequel on prend beaucoup de plaisir à travailler. Si on fait le résumé de cette compétition, ce groupe a été au rendez-vous et tout proche d’être tout en haut avec ses trois derniers matches qui se terminent à un but. Cela démontre la difficulté d’un Euro et toute la qualité produite durant cette quinzaine. Cette quinzaine ne se résume pas à cette défaite cruelle en prolongations. Nous avons produit des choses qui peuvent nous donner du baume au cœur pour l’avenir avec ce groupe élargi.
Les retours de Luka Karabatic et de Nedim Remili plus ce collectif et sa jeunesse, c’est encourageant pour l’avenir, non ?
Je ne vois pas l’avenir en faisant des plans sur la comète car depuis deux ans, nous avons déchiré plusieurs plans. Nous disposons d’une base large et d’un effectif sur lequel on peut en effet s’appuyer. Un certain de joueurs, dont ceux cités, ont un vécu plus fort, ont déjà marqué de leur empreinte des compétitions importantes et apportent de la stabilité. Les jeunes qui ont découvert la compétition internationale - 9 joueurs sur les 20 présents - ont réalisé d’excellentes choses. Pour un bilan plus précis, il faudra prendre le temps de la digestion.
Le prochain rassemblement est déjà programmé du 14 au 20 mars avec la 3e étape de la Golden League au Danemark. Avec quel profil d’équipe comptes-tu te travailler et disputer les deux matches programmés les 19 et 20 mars ?
Il est prématuré d’imaginer quel sera le profil de notre équipe lors de cette prochaine échéance de la Golden League. Nous disposons d’un groupe très large sur lequel nous appuyer. Quels que soient les joueurs présents, nous aurons une belle semaine de travail.
La 4e place de cet Euro a permis à l’équipe de France de décrocher sa qualification directe pour le Mondial 2023 en Pologne et en Suède. Du coup, la semaine internationale du 11 au 17 avril est à bâtir. As-tu déjà imaginé le contenu de ce rassemblement ?
Avec la fédération, nous sommes actuellement en pleine réflexion pour affiner le programme de cette semaine-là. Nous disputerons très certainement deux matchs en France face à des adversaires huppés afin de continuer à travailler et de proposer à nos supporters deux belles affiches.
Propos recueillis par Hubert Guériau